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NON au débat du 5 avril, « Islam et laïcité », voulu par l’UMP
NON au discours d’Etat raciste et xénophobe
- Après le pseudo débat sur l’identité nationale – lancé le 2 novembre 2009 par Eric Besson – qui avait fortement contribué à libérer la parole raciste,
- – Après le discours de Brice Hortefeux du 28 juillet 2010 contre les Roms, annonçant les destructions d’habitats précaires et expulsions vers l’ Europe de l’Est ,
- – Après le discours de Grenoble du 30 juillet 2010 de Nicolas Sarkozy, assimilant immigration et insécurité,
- – Après la volonté du ministre de l’Education Luc Chatel de mettre à l’écart les mères portant le foulard de tout accompagnement de sorties scolaires,
- – Après les tentatives présidentielles de remise en cause du droit du sol, finalement abandonnées par l’Assemblée Nationale
- – Après la réintroduction par l’Assemblée Nationale d’une manifestation de volonté pour que les jeunes de 18 ans, nés en France de parents étrangers, puissent acquérir la nationalité française,
- – Après qu’une vingtaine de personnalités en colère de la Mosquée de Paris, dont le recteur Dalil Boubakeur, aient appelé le 10 mars à annuler le débat sur la « laïcité », promu par Jean-François Copé, et lancé un « appel pour la dignité de l’islam en France »,
- – Après les propos provocateurs de Claude Guéant, nouveau ministre de l’Intérieur, déclarant le 17 mars que les Français ont parfois le « sentiment de ne plus être chez eux », à cause d’une « immigration incontrôlée » puis, le 24 mars sur I-Télé, que non seulement les agents du service public « ne doivent pas porter de signes religieux, manifester une quelconque préférence religieuse mais les usagers du service public ne doivent pas non plus »,
- – Après les récentes discordances gouvernementales à propos du débat de l’UMP du 5 avril, dont l’emprise et la durée n’ont cessé de rétrécir au gré des difficultés politiques de la majorité, en particulier à l’issue des élections cantonales,Le nouveau débat, en instrumentalisant une fois de plus le principe de laïcité, stigmatise et met à l’écart les citoyennes et citoyens musulmans, renforce le racisme islamophobe qui est lourd de périls pour le vivre ensemble et trouve des boucs émissaires pour faire oublier la question sociale et la crise économique qui creuse encore les inégalités.En chassant sur les terres du front national, pour des raisons bassement politiciennes et électoralistes, le gouvernement actuel et le chef de l’Etat, relayés par de nombreux media, franchissent toujours plus les garde-fous qui séparaient la droite républicaine de l’extrême-droite raciste et xénophobe, accélèrent la lepénisation des esprits et ainsi renforcent la montée du front national.Le MRAP tient à souligner que ce débat, en alimentant les peurs irrationnelles et les fantasmes, dresse des citoyens les uns contre les autres, favorise le repli, met gravement à mal le vivre ensemble.
Le MRAP appelle à un sursaut général pour faire échec au projet néfaste du 5 avril. Il appelle à une forte mobilisation de toutes et tous – en particulier par la création de collectifs locaux – pour préparer activement la manifestation nationale du samedi 28 mai « contre le racisme, la politique d’immigration du gouvernement et pour la régularisation des sans papiers ».
Paris, le 30 mars 2011.
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Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples
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LE COMMUNIQUÉ EN FICHIER .pdf: cp-20110330-5avril MRAP
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Réponse d’un « ami musulman » à la lettre de Jean-François Copé
» Pour ces raisons, tu comprendras que je ne souhaite pas venir à ta petite fête du 5 avril. Je préfère vous laisser laver votre linge sale en famille. Fais-moi signe quand tu auras repris tes esprits et que les choses se seront un peu calmées vers chez toi. «
Cher Jean-François,
J’ai lu avec grand intérêt la lettre que tu m’as adressée dans L’Express et, puisque nous sommes désormais amis, permets-moi de te tutoyer et de te dire les choses en toute franchise.
D’abord je dois te confier que chez moi (en France avant que tu demandes), ce n’est pas comme ça que l’on traite ses amis. On ne fait pas un débat pour savoir comment nos amis devraient s’habiller ou s’exprimer. On ne se mêle pas de leur vie religieuse et on ne se permet pas de dire à leur fille que sa robe est trop longue. Ce serait très déplacé, tu en conviendras.
On ne se sert pas non plus de ses amis pour gagner des élections. On ne salit pas leur dignité et on ne leur porte pas préjudice, même si ça fait monter l’audimat au radio-crochet du coin…
Tu dis vouloir m’aider à combattre les préjugés à mon sujet, mais c’est toi qui les alimentes à chaque fois que tu prononces les mots islam, menace et laïcité dans la même phrase. Je ne t’ai rien demandé et je n’ai pas besoin de ton aide. Je veux juste que tu me laisses en paix.
Le jour où tu auras vraiment envie d’avoir une conversation avec moi, retrouve moi autour d’un bon repas, sans caméras si possible, comme ça tu pourras me regarder dans les yeux te dire le fond de ma pensée.
D’ici là, si vraiment tu t’ennuies et qu’il te reste de l’énergie, je peux t’indiquer un certain nombre de problèmes qui requièrent toute ton attention dans le pays : à commencer par le fait qu’il manque du travail à beaucoup de nos concitoyens et que les gens ne se parlent quasiment plus depuis que toi et ton équipe tenez le micro.
J’aimerais aussi répondre point par point à un certain nombre de remarques que tu fais dans ta lettre et qui, si l’un de nos amis la lisait, risqueraient de l’induire quelque peu en erreur.
Qui « défigure » l’islam ?
Quand tu dis que notre foi, l’islam, est « défigurée dans l’opinion par des comportements ultraminoritaires », ce serait bien de rappeler que cette « opinion » se construit moins à partir de la réalité que du discours politique et médiatique auquel, il me semble, tu participes un peu (note ce doux euphémisme que l’amitié t’offre en privilège).
Toi qui as depuis fort longtemps renoncé à la langue de bois et à la stratégie politique, tu devrais savoir qu’il ne convient pas de dire une chose et son contraire d’une interview à la suivante. On pourrait t’accuser de tenir un double discours ce qui, par les temps qui courent, reviendrait à te bannir de la sphère publique où tu sembles t’épanouir.
Plus loin dans ta lettre, tu parles de mon grand-père mais tu confonds probablement, c’est celui d’un autre qui est mort à Verdun. Le mien a combattu à Al Alamein en Egypte, dans une guerre qui n’était pas la sienne. Du côté de maman, ils étaient plutôt vers Alger, où ils ont pu découvrir les joies de l’électricité dans les années 50.
C’est vrai que tout ça fait partie du passé… mais je suis bien content que tu fasses avec moi ce devoir de mémoire qui nous rappelle d’où nous venons et ce qui nous unit, tout en nous permettant de tirer des enseignements qui nous éviterons de répéter les mêmes erreurs. Comme par exemple de stigmatiser une partie de nos concitoyens pour des objectifs politiques.
L’alibi de la laïcité
Tu voudras bien m’expliquer aussi pourquoi dès que tu parles d’islam, tu te sens obligé d’invoquer la laïcité pour dire quelque chose de pas sympa juste après.
Si tu n’aimes pas les barbes et les foulards, libre à toi d’exprimer ton opinion. Nul besoin de faire comme tous ceux qui, pour légitimer leur rejet des formes visibles de l’islam, se drapent sous la cape de la laïcité en espérant y trouver une respectabilité à leur racisme d’autrefois.
Je sais bien que tu n’en fais pas partie, toi qui poursuit des objectifs « empreints de paix et de respect », mais c’est tout de même dans ton camp qu’on entend des gens parler de « croisades », de la « France [qui] doit rester la France », et du jeune musulman dont on veut « qu’il travaille, qu’il ne parle pas verlan et qu’il ne mette pas sa casquette à l’envers ».
Si c’est toi le chef de cette belle équipe d’esprits éclairés, je te souhaite bien du courage. C’est bien d’avoir une opinion. C’est mieux d’avoir la vérité. Or notre vérité commune est dictée par la loi de notre pays et il se trouve justement qu’en 1905, une loi a été votée pour établir le principe de laïcité que les polémistes (contre lesquels tu fais bien de t’insurger) ressassent à tort mais surtout à travers sans vraiment l’avoir lue.
Laïcité=liberté (y compris de porter la barbe)
Et que dit-elle cette loi ? Elle dit que nous sommes libres. Libres de choisir en conscience notre religion et de la vivre comme bon nous semble, sans faire de prosélytisme et sans devoir la cacher ou la renier dans la sphère publique. Libres de s’habiller comme il nous plaît, de porter une barbe ou de se couvrir la tête si on le souhaite. Libres de prendre notre place au sein de la République comme nous l’avons fait jusqu’ici en l’enrichissant de notre travail, de nos idées et de nos espoirs.
Aucune instance musulmane n’a réclamé le changement de cette loi. Aucun musulman n’a demandé un privilège dont serait exclu l’un de ses concitoyens.
Nous demandons, et la majorité de nos concitoyens avec nous, le strict respect de la loi de 1905. Sans cadres ni contraintes supplémentaires et sans polémiques pour venir, chaque jour un peu plus, restreindre nos libertés et nos droits fondamentaux.
Citoyens comme les autres
Mon cher Jean-François, à trop vouloir nous aider, tu risques de nous causer du tort en faisant croire qu’il y a une spécificité islamique qu’on aurait jusque là ignorée. Il n’en est rien. Nous sommes des citoyens comme les autres, acteurs anonymes des changements et des sacrifices que doit concéder notre pays aujourd’hui.
Ta famille politique n’est pas étrangère à cette situation (mais bon, on ne choisit pas sa famille…). Ce serait malheureux de donner ainsi raison à ces mauvaises langues que j’entends déjà dire qu’avec des amis comme toi …on n’a pas besoin d’ennemis.
Pour ces raisons, tu comprendras que je ne souhaite pas venir à ta petite fête du 5 avril. Je préfère vous laisser laver votre linge sale en famille. Fais-moi signe quand tu auras repris tes esprits et que les choses se seront un peu calmées vers chez toi.
Je termine en te rappelant que le respect, c’est d’accepter l’autre tel qu’il est et non tel qu’on voudrait qu’il soit, avec ses différences. Il serait bon que tu t’en souviennes désormais, avant d’invoquer une idée de fraternité que tu piétines chaque jour.
Ton ami, Marwan Muhammad.
Photo : Jean-François Copé arrive au siège de l’UMP pour une conférence de presse après le premier tour des cantonales, le 21 mars 2011 (Benoît Tessier/Reuters).
Billet mis en ligne par D.R. (DS Cgt Tyco Electronics France SAS)